Accueil Brèves Plan du site Contact Admin


COLISEE Articles
comité pour l’information sur l’Europe de l’Est
   
 
 
[ Imprimer cet article ]


Les transports en Moldavie : un secteur stratégique pour le désenclavement du pays (décembre 2004)


mercredi 1er décembre 2004

La Moldavie se situe dans le sud-est européen, aux confins des Balkans, encastré entre les Carpates, les grandes plaines ukrainiennes et la Mer Noire. Cela signifie qu'elle se trouve au cœur d'une zone géostratégique de premier ordre. Le fait que, dans l'Histoire, elle ait été disputée par les grandes puissances autour d'elle le prouve.

La région est donc le carrefour de trois civilisations : la latinité, le monde slave et la civilisation musulmane. La proximité de la Mer Noire lui offre aussi une ouverture sur le bassin économique de l'Asie Centrale et par extension sur la route de la soie.

Cette situation géographique est un atout pour la Moldavie. Elle lui permettra, grâce à une politique d'intégration dans les grands programmes européens et de la CEI, d'être le lien entre les deux Europes et avec l'Asie, en offrant une alternative aux grandes routes maritimes (canal de Sue).

Malgré ces atouts, la Moldavie possède un gros point faible : elle est une enclave. Par rapport à la Bessarabie médiévale, elle se trouve amputée au sud de son accès à la mer Noire et elle est affublée à l'Est d'une bande de terre auparavant ukrainienne, la Transnistrie.

L'enclavement n'est pas un attribut spatial figé par rapport à une position continentale.

C'est un processus fondé sur des discontinuités historiques et qui aboutit à des inversions territoriales. Ce sont les stratégies des acteurs publics qui suscitent l'enclavement, mais ces stratégies sont réversibles.

En terme de transport, les politiques pro-roumaines et pro-soviétiques qui se sont succédées dans l'histoire ont eu pour effet l'inversement territorial de la Moldavie :
-  Il n'existe plus l'ouverture maritime du temps de la Bessarabie ;
-  Les connexions historiques avec la Roumanie sont devenues rares ;
-  Les incompatibilités techniques demeurent, en particulier dans les chemins de fer (gabarits et électrification).

C'est le "paradoxe moldave" : celui d'être au cœur de l'Europe, au sens géographique du terme, et avoir été mis à l'écart du processus de développement continental, faute de structures et à cause de politiques contradictoires.

L'action de désenclaver est donc une volonté politique, assortie ou non d'une viabilité économique. D'un point de vue politique, l'effet structurant des transports se traduit d'abord par la continuité territoriale et l'unité du pays. D'ailleurs, malgré son autonomie, si la Transnistrie est toujours « moldave » et non indépendante, c'est en partie grâce aux liens physiques qui relient son réseau au reste de la Moldavie mais peu à l'Ukraine.

Pour les décideurs politiques d'aujourd'hui, il s'agit d'inverser ce phénomène en recréant les liens historiques entre la Moldavie et ses pays voisins. En effet, avant 1940, la rive droite du Dniestr était roumaine et sa rive gauche, ukrainienne. Le fait que ces deux parties se retrouvent dans une seule entité territoriale unique est une chance. La Transnistrie peut jouer le rôle de lien avec la CEI et la Moldavie occidentale avec l'Union élargie de 2007, dans le cadre de la Politique Européenne de Voisinage (PEV).

Le désenclavement de la Moldavie, pays de petite taille, doit donc se faire dans le cadre d'une cohérence territoriale régionale pour assurer sa pertinence économique, au delà du pacte de stabilité de l'Europe du Sud-Est : une zone d'échanges comprenant la Moldavie, la Roumanie et l'Ukraine dans un espace économique plus large qui comprendrait l'Union européenne au 1er janvier 2007, la CEI et le bassin de la mer Noire (Turquie, pays du Caucase).

En plus de sa stabilité politique, le désenclavement de la Moldavie peut donc avoir des conséquences macro-économiques positives, à long terme. Ce désenclavement passe par une politique de transports intégrée à la stratégie européenne (corridors pan-européens de transport) ainsi qu'aux programmes de la CEI.

Le secteur des transports en Moldavie se caractérise par une infrastructure désuète et peu entretenue, du fait de la pauvreté du pays, de son instabilité politique et du peu d'intérêt de la part des institutions internationales.

Une lente mutation a été amorcée depuis 1999 avec un secteur aérien rationalisé et un secteur ferroviaire en conversion, le tout dans une volonté politique générale ambitieuse. Toutefois, cette mutation est lente à cause des lourdeurs administratives qui caractérisent les pays de l'ancienne URSS et surtout de la présence de la Transnistrie qui annihile toutes les velléités d'ouverture économique.

L'ouverture de la Moldavie est tout de même indispensable. Il en va de l'intégrité territoriale de ce jeune pays et de la stabilité de toute la région sud des Balkans. Isoler la Moldavie constituerait un danger pour l'Union européenne, surtout après son élargissement ; et la repousser vers l'est priverait l'Europe d'un partenaire très bien placé sur la carte eurasienne. De plus, les transports sont des moyens de communication assurant un lien social important en plus de l'utilité économique. La Moldavie, par son histoire mouvementée est un pays multiracial et pluriculturel. Elle a besoin d'infrastructures pérennes pour assurer la paix sociale et éviter les isolationnismes des nombreuses minorités. Elle doit donc désenclaver et se désenclaver.

On pourrait trouver ainsi une spécialisation logistique à la Moldavie, en prenant en compte sa faible industrialisation, sa position géographique proche de la mer Noire et ses infrastructures, existantes et en projet (double écartement des voies de chemin de fer, par exemple).

Avec une politique adéquate d'investissement dans les grosses infrastructures et d'incitation à l'établissement (zones franches, défiscalisation), la Moldavie pourrait attirer beaucoup d'entreprises désireuses de se positionner sur un marché « eurasien » dont les produits doivent être adaptés à chaque marché : travail à façon sous un régime douanier de perfectionnement, reconditionnement, etc… permettant à la Moldavie d'apporter une valeur ajoutée substantielle aux produits transitant par son sol.

Ce secteur pourvoirait à la Moldavie les emplois dont elle a besoin et la viabilité économique qui lui manque : la zone logistique d'entrée/sortie en Europe. Peut-être une idée à explorer ?

Vincent LECOT
-  Auteur d'un mémoire de fin d'études à l'École Supérieure des Transports de Paris : "République de Moldavie : Un pays à développer, une nation à libérer/Analyse systémique des transports et principes pour le désenclavement".
-  Disponible sur le Groupe Yahoo ! Moldavie en format PDF http://fr.groups.yahoo.com/group/mo...
-  Ou auprès de Vincent LECOT - 11 rue de la République 60240 Chaumont-en-Vexin
-  Tél/fax : 03 44 03 41 26
-  Mob. : 06 86 07 79 93
-  E-mail : vlecot@gmx.net



[ Imprimer cet article ] [ Haut ]
 

 
 
  01. Accueil
02. Albanie
03. Arménie
04. Azerbaïdjan
05. Biélorussie
06. Bosnie-Herzégovine
07. Croatie
08. Géorgie
09. Kazakhstan
10. Kirghizstan
11. Macédoine
12. Moldavie
13. Monténégro
14. Ouzbékistan
15. Russie
16. Serbie
17. Tadjikistan
18. Turkménistan
19. Ukraine
20. Etats autoproclamés
21. Union européenne
22. Grandes régions d'Europe et d'Asie
23. Thèmes transversaux
24. Les séminaires et les conférences
25. Les dossiers du COLISEE

Contact
 

 
 
Dans la même rubrique

Autres articles :
La situation dans le secteur agricole de Moldavie est catastrophique (mai 2004)
Le contrôle russe sur l'économie moldave (janvier 2004)

 



© 2013 COLISEE