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Géorgie, France et URSS : Ekvtimé Takhaïchvili (1863-1953), savant et homme politique


EKVTIME TAKAISHVILI
mercredi 16 mars 2011, par Mirian Méloua

Professeur à l'Université de Tiflis, député à l'Assemblée Constituante géorgienne en 1919, vice-président de cette même assemblée, convoyeur du trésor national géorgien vers la France en mars 1921, Ekvtimé Takhaïchvili en assure le retour en 1945 après que les autorités soviétiques aient pris l'engagement de le conserver en Géorgie auprès de Charles De Gaulle.

Ekvtimé Takhaïchvili est né le 3 janvier 1863 dans un petit village de Gourie, à Likhaouri, en Géorgie occidentale. En 1887, il sort diplômé de l'Université de Saint-Pétersbourg et devient professeur d'histoire à Tiflis jusqu'en 1904. Il est ensuite nommé directeur de lycée, tout en continuant à enseigner l'histoire. Il contribue au renouveau de la Société d'Histoire et d'Ethnographie de Géorgie, dont il prend rapidement la direction.

En mai 1917, à la faveur de l'avancée des troupes russes sur le territoire ottoman (Trébizonde, Erzéroum et Van), il conduit une expédition archéologique, inventorie et étudie des monuments d'architecture chrétienne géorgienne des IXème et Xème siècles, inaccessibles depuis des décennies : cathédrale de Bana (Péniak), églises et monastère du défilé de Kakhouli, église d'Ekek, cathédrale d'Ochki, église d'Ichkhan et basilique de Parhal. Ses travaux restent un témoignage scientifique relatif à des édifices aujourd'hui endommagés ou disparus.

Au retour de l'indépendance de la Géorgie, en mai 1918, il devient professeur à l'Université de Tiflis. En février 1919, il est élu à l'Assemblée Constituante au titre de l'opposition nationale-démocrate (1) et en devient vice-président aux côtés de Nicolas Cheidzé.

Le 16 mars 1921, après l'entrée de l'Armée rouge en Géorgie, l'assemblée vote l'expatriation du trésor national géorgien pour le mettre à l'abri et en confie la garde à Ekvtimé Takhaïchvili, pourtant opposé à l'opération. Le 17 mars, il convoie ces objets d'une valeur inestimable de Batoumi à Constantinople, sur le bateau Ernest Renan. Il organise ensuite leur transfert à Marseille sur le bateau Bien Hoa, escorté par la marine nationale français à l'approche du port de destination.

*

En 1927, Ekvtimé Takhaïchvili est l'un des sept membres initiaux de la Société Civile Immobilière propriétaire de la résidence d'exil en France de la Ière République de Géorgie, aux côtés de représentants sociaux-démocrates et sociaux-fédéralistes (2).

Dans les années trente, les péripéties parisiennes sont multiples : la représentation diplomatique de la Ière République de Géorgie disparaît, les coûts de location de coffre-forts abritant le trésor national géorgien peuvent difficilement être assumés.

Au début des années quarante, il soustrait dicrètement ce trésor de la vue de l'occupant allemand.

Le 11 avril 1945, le professeur Ekvtimé Takhaïchvili atterrit à l'aéroport de Tbilissi, de retour d'exil. Il convoie trente-neuf caisses et est porteur d'une garantie écrite du général De Gaulle et du maréchal Staline. Le vieil homme, âgé de 82 ans, veille au transfert du trésor national géorgien au Musée des Arts de Géorgie (3). Il est nommé à l'Académie des Sciences et retrouve sa chaire à l'Université de Tbilissi.

Il meurt le 21 février 1953, non sans avoir fait rapatrier auparavant la sépulture de son épouse décédée en France et inhumée dans le "carré géorgien" du cimetière communal de Leuville-sur-Orge.

Notes

(1) Aux élections de l'Assemblée Constituante géorgienne de février 1919 le parti national-démocrate recueille 5,9 % des voix et 8 sièges (sur 130). Il ne participe pas au 3éme gouvernement, homogène social-démocrate. Son influence reste pourtant grande dans le pays tant par ses chefs de file historiques que par certains de ses membres précédemment ministres dans les gouvernement d'union nationale. Il convient de citer en particulier Seït Devdariani, Iason Djavakhichvili, Révaz Gabachvili, Guiorgui Gvazava, Guiorgui Jourouli (ministre des Finances, du Commerce et de l'Industrie de mai à août 1918), Ivané Lordkipanidzé (ministre des Transports de mai à août 1918), Niko Nikoladzé, Pétré Sourgouladzé, Vasil Tsérétéli, David Vachnadzé, Ivané Zourabichvili.

(2) Leuville-sur-Orge : la petite Géorgie

(3) Le Musée des Beaux-Arts de Tbilissi dispose d'environ 60 000 pièces, parmi lesquelles figurent en bonne place manuscrits anciens, pièces de toreutique et d'orfèvrerie, émaux cloisonnés, icônes ciselés d'or et d'argent, croix d'autel et de procession, coupes, ostensoirs provenant des caisses d'Ekvtimé Takhaïchvili. Lors du retour du trésor national géorgien à Tbilissi, les autorités géorgiennes en exil avaient affirmé qu'aucune pièce ne manquait. Le pouvoir soviétique n'avait pas démenti. Certains témoignages, difficiles à vérifier soixante années après, ont affirmé le contraire.

*

Sources multiples :

-  Géorgie, bibliographie : histoire, témoignages et romans historiques

-  Internet dont David Marshall Lang, Levan Urushadze, Marxists, Wikipedia.

Voir aussi :

-  Géorgie : les partis politiques avant 1991

-  La Ière République de Géorgie (1918-1921)

-  La Ière République de Géorgie en exil en France

-  photographie d'Ekvtimé Takhaïchvili aux obsèques de Nicolas Cheidzé, en 1926 à Paris http://www.samchoblo.org/agf_gouver...

-  Le "carré géorgien" du cimetière communal de Leuville-sur-Orge



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