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"Oui, l'Ukraine est européenne !" par Gilles DUTERTRE


jeudi 7 décembre 2006

La première réunion du Conseil présidentiel Ukraine - Lituanie, suivie d'une visite officielle du Président lituanien, a eu lieu du 14 au 16 Novembre 2006 à Kiev, au palais Mariinsky. Ce fut l'occasion pour les deux présidents de renforcer les liens politiques, économiques et humanitaires tissés depuis 15 ans entre les deux pays.

Le président ukrainien, Victor Iouchtchenko, a souligné que la stabilité du partenariat était basée sur un désir commun de construire une Europe libre et stable. De son côté, le président lituanien, Valdas Adamkus a réaffirmé le soutien de la Lituanie aux aspirations euro-atlantiques de l'Ukraine.

Cette rencontre est pour moi l'opportunité d'affirmer, contrairement à certaines assertions en vogue, la légitimité de l'Ukraine à vouloir adhérer à l'Union Européenne. En effet, beaucoup de politiciens français ont tendance à mettre dans le même sac l'Ukraine (ainsi que la Biélorussie et la Moldavie) et la Turquie. Pire : on glose à l'envi sur la candidature turque, mais on rejette négligemment, souvent par le mépris, toute demande ukrainienne. On ne lui reconnaît même pas « sa vocation à adhérer à l'Union » que l'on a reconnue à l'Albanie, à la Bosnie-Herzégovine et à la Serbie !

Rappelons d'abord quelques évidences. L'article 237 du traité de Rome, puis l'article 49 du traité de Maastricht stipulent que « tout Etat européen peut demander à devenir membre (…) ». S'il n'est pas difficile de montrer qu'à 97 % le territoire de la Turquie n'est pas en Europe, il serait pour le moins stupide de l'affirmer de celui de l'Ukraine !

J'insisterai au passage sur un point de l'histoire, celle-ci expliquant souvent la situation géopolitique contemporaine. Du XIVème au XVIIIème siècle, la totalité du Belarus et la partie occidentale de l'Ukraine faisaient partie de la République polono-lituanienne (Lenkijos ir Lietuvos valstyb ?). Lors de la « Révolution orange », ce sont les Présidents polonais et lituaniens qui, grâce à leurs bons offices, et mus par cette union passée, ont facilité le dénouement de la crise. Il y a indubitablement une communauté de culture et d'esprit entre ces trois pays et, à terme, avec la Biélorussie. Voudrait-on l'effacer d'un trait de plume arbitraire ?

Le Conseil européen de Copenhague, en 1993, a défini des critères auxquels les pays candidats doivent satisfaire :
-  Critère politique : présence d'institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l'homme, le respect des minorités et leur protection ;
-  Critère économique : existence d'une économie de marché viable ;
-  Critère de la reprise de l'acquis communautaire.

L'Ukraine, par la voix de son résident, Viktor Iouchtchenko, a déclaré qu'elle était candidate à l'adhésion à l'Union en 2005, mais elle n'a pas encore déposé une demande formelle. Mais, sans attendre, le commissaire à l'élargissement, Olli Rehn, freine cette démarche, qu'il juge prématurée ! Au nom de quoi ? Sans doute, une fois de plus, pour des raisons stratégiques vis-à-vis de la Russie. Ou bien par peur que l'UE n'apparaisse comme un club chrétien ? Ou encore par un tropisme pro-turc hérité des études supérieures du Commissaire effectuées aux Etats-Unis ? Car, pour comparer avec un pays que je connais bien pour y avoir séjourné 20 mois, pourquoi ne trouve-t-il pas prématurée la candidature de la Bosnie-Herzégovine qui, de facto, n'est même pas un Etat ? !

Il est proprement honteux de ranger l'Ukraine dans le même sac des pays dits du « nouveau voisinage », définis lors du Conseil européen de Décembre 2002, qui n'ont actuellement aucune perspective d'adhésion, où l'on trouve, outre l'Ukraine, le Belarus et la Moldavie, la Russie et les pays du sud méditerranéen. Il faut laisser le temps à l'Ukraine, à la Moldavie et à la biélorussie (notamment pour ce dernier pays de se défaire de Loukashenko) d'atteindre les critères de Copenhague, mais il faut leur dire clairement qu'ils ont vocation à entrer dans l'Union, ce qui ne pourra, en outre, que favoriser leurs réformes.

Laissons le mot de la fin au président Valdas Adamkus à Kiev le 14 novembre : « La Lituanie a toujours soutenu et soutiendra toujours les objectifs de l'Ukraine d'elle aussi emprunter cette voie de la modernisation, de la stabilité économique et de l'intégration européenne. » Puisse la Lituanie ne pas rester seule dans cette entreprise !

Gilles DUTERTRE

Vilnius, http://gillesenlituanie.hautetfort.com



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