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Les Allemands de Lituanie : le souvenir d'un grand passé


vendredi 19 janvier 2007

Les Allemands constituent l'une des plus anciennes minorités de Lituanie. Leur implantation remonterait au XIIIe siècle.

Agriculteurs ou artisans, sauf en Lituanie mineure, ils vivent alors généralement isolés des populations environnantes. Bien organisés, ils se regroupent très tôt en sociétés, guildes, fraternités et autres corporations de type ethnique ou national.

En 1897, on dénombrait 117.000 Allemands sur le territoire de la Lituanie ethnique. En 1923, après la guerre et la constitution de la République de Lituanie, ils n'étaient plus que 29.000 (hors les districts de Vilnius et Klaïpeda). En 1938, il existait, en dehors du district de Klaïpeda, 18 organisations civiques ou politiques allemandes. La plus importante d'entre elles, la Kulturverband (1924-1940) disposait de 19 sections régionales. Elle s'occupait des écoles et autres institutions allemandes du pays. De 1931 à 1940, elle publia un journal intitulé : Deutsche Nachrichten für Litauen (Nouvelles allemandes pour la Lituanie).

D'autres organisations sectorielles jouaient également un rôle important : la Société des Écoles Allemandes (crée en 1920), le Parti allemand de Lituanie (créé en 1920), l'Association des citoyens allemands de Lituanie (créé en 1921), le club sportif Kultus (créé en 1924), la Société de coopération germano-lituanienne (créée en 1928), etc.

Parmi les personnalités marquantes de cette époque, il faut mentionner l'écrivain Herman Zuderman (originaire de la région de Siluté) et bien sûr Thomas Mann qui, entre 1930 et 1942, résida souvent dans sa maison de Nida (Nidden).

Auprès des masses lituaniennes, l'image des Allemands est ambiguë. On loue leur sérieux et leur application, mais on raille leurs prétendus travers (un peu comme en Alsace au début du siècle) : suffisance et absence de fantaisie et d'imagination. L'habitude qu'on leur prête de se présenter comme un peuple de Kulturträger est volontiers ridiculisée. Ainsi, en 1934, paraît un ouvrage intitulé La culture allemande dans lequel on peut lire (1) : « L'imagination des Allemands est limitée, elle se nourrit seulement de leur triste et pauvre mythologie et des souvenirs du Moyen-Âge. Une fois écartés tous les fantômes, dragons, démons, gnomes, chevaliers et autres châteaux enchantés, la psychologie allemande se réduit à une vie quotidienne prosaïque que chacun mène selon sa classe et ses moyens ». Inutile de préciser l'écho que ce livre très populaire en Lituanie, eut à l'époque dans l'Allemagne nazie !

Après l'annexion de la Lituanie par l'Union Soviétique en 1940, 50.652 Allemands furent rapatriés en Allemagne en 1941. Durant l'occupation nazie, un nombre équivalent d'Allemands vinrent s'installer en Lituanie (pour l'essentiel, les mêmes). La seconde annexion soviétique sonna l'heure du départ définitif pour la plupart d'entre eux.

Les rares individus demeurés dans le pays tentèrent alors de se fondre dans la masse et de se faire oublier. Ils vécurent dans la plupart des cas des années difficiles, étant assimilés par les autorités aux envahisseurs nazis. La fin des années 80, avec la réforme gorbatchévienne, marqua la fin du cauchemar et l'heure du réveil pour la petite communauté résiduelle (2). Depuis 1989, une Société culturelle germano-lituanienne est active en Lituanie. Elle entretient des sections à Vilnius, Klaïpeda, Kaunas, Jurbarkas, et Kelme. Le journal ressuscité Deutsche Nachrichten für Litauen, ainsi que le mensuel Baltische Rundschau entretiennent le contact entre ces groupes.

L'église protestante allemande de Vilnius est redevenue un lieu de culture très fréquenté, mais la paroisse comporte aujourd'hui plus de Lituaniens que d'Allemands. Les Allemands de Lituanie sont aujourd'hui, soit luthériens évangéliques, soit évangéliques réformés.

NOTES
-  (1) Paulius Slavenas. Vokieciu kultura. Naujoji Romuva, p. 67.
-  (2) 2.000 personnes en 2001, vivant surtout à Klaïpeda, Siluté, Vilnius et Kaunas. Certains sont en fait originaires de Russie et … russophones.

Yves Plasseraud, président du Groupement des Minorités (GDM) et professeur à l'Université de Vilnius.



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