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La Transcaucasie (1917 - 1918)


lundi 14 mars 2011, par Mirian Méloua

En octobre 1917, à quelques jours de sa dispersion, le gouvernement provisoire russe de Pétrograd crée à Tiflis un Comité spécial de Transcaucasie (OZACOM) couvrant les territoires actuels de l'Arménie, de l'Azerbaïdjan et de la Géorgie, plus des territoires annexés ensuite par la Russie et par l'Empire ottoman.

Après la révolution d'octobre, l'OZACOM ne reconnait pas l'autorité bolchévique de Petrograd : il crée un Haut Commissariat à la Transcaucasie présidé par Evguéni Guéguétchkori, ancien député représentant la Géorgie à la Douma russe.

Le 10 février, une Assemblée parlementaire provisoire transcaucasienne, la SEIM (1), est constituée à Tiflis sous la présidence de Nicolas Cheïdzé, ancien représentant de la Géorgie à la Douma russe et président du Soviet de Petrograd de février à octobre 1917 : Evguéni Guéguétchkori est reconduit à la tête de l'éxécutif. Elle ne reconnait pas, elle non plus, l'autorité bolchévique mais marque son attachement à la "ligne politique dite russophile".

Le traité de paix séparée entre la Russie bolchévique et les Empires allemand, autrichien et ottoman

Le traité de paix séparée signé à Brest-Litovsk entre la Russie bolchévique et les trois Empires centraux entraîne le retour du front turc des soldats de l'ex-armée tsariste et crée le désordre en Transcaucasie (2). L'empire ottoman demande à la SEIM l'application de ses clauses, en particulier l'évacuation des districts géorgiens d'Ardahan, d'Artvin et de Batoumi, et du district arménien de Kars. L'assemblée transcaucasienne refuse.

Le 26 mars, le délégué de la SEIM à la conférence de Trébizonde, Akaki Tchenkéli, ancien représentant de la Géorgie à la Douma russe, donne son accord en contradiction avec le mandat qui lui a été confié : les représentants allemands lui ont discrètement expliqué que l'Empire allemand encourage la Transcaucasie à se détacher de la Russie et qu'il garantit en contrepartie son indépendance selon la "ligne politique dite germanophile", à laquelle adhèrent déjà certains nationalistes géorgiens.

Le 31 mars, la SEIM déjuge son délégué.

Le 1er avril, l'armée ottomane s'avance et prend Batoumi.

Le 9 avril, la SEIM (dont la majorité a été retournée (3)) proclame l'indépendance de la République démocratique fédérative de Transcaucasie : Akaki Tchenkéli est nommé chef de l'exécutif.

Les intérêts arméniens, azéris et géorgiens divergent

Les négociations avec l'Empire ottoman reprennent à Batoumi. Afin de se protéger de tout mouvement armé hostile, les représentants ottomans revendiquent le contrôle du chemin de fer d'Alexandropol à Djoufla et celui des districts d'Alexandropol, d'Akhalkalaki et d'Akhaltsikhé. La délégation transcaucasienne se divise : les intérêts des musulmans azéris (sensibles aux positions ottomanes), ceux des représentants arméniens (profondément opposés à l'Empire ottoman qui occupe leur territoire) et ceux des représentants géorgiens (trouvant auprès de l'Empire allemand un protecteur vis-à vis de l'Empire ottoman) divergent.

La République démocratique fédérative de Transcaucasie n'y survit pas. Lors de la dernière séance de la SEIM, à la question du député russe constitutionnel-démocrate Semenov, Irakli Tsérétéli répond que "si une grande nation comme le peuple russe peut survivre, quoique bien affaiblie, à une crise bolchéviste, un petit peuple risque d'en périr, et que, pour les petites nations surtout, l'intérêt national est primordial". C'est l'abandon de la "ligne politique dite russophile", évolution qui déterminera l'histoire moderne du peuple géorgien.

La Géorgie proclame son retour à l'indépendance le 26 mai 1918 (4), suivie de l'Arménie (5) et de l'Azerbaïdjan (6).

Notes :

(1) La SEIM, parfois Sejm, transcaucasienne est composée des députés élus en Transcaucasie lors des élections de l'Assemblée constituante russe de novembre 1917. Elle comporte 44 députés musulmans à dominante azérie (41 du Moussavat nationaliste et 3 sociaux-démocrates), 29 Géorgiens (24 sociaux-démocrates, 3 sociaux-révolutionnaires et 1 nationaliste), 24 députés arméniens (21 du Dachnaksoution nationaliste, 2 sociaux-révolutionnaires et 1 social-démocrate) et 3 députés russes (1 constitutionnel-démocrate, 1 social-démocrate et 1 social-révolutionnaire).

(2) Souvenir (d'après le journal d'un émigré géorgien) : "Contentes d'échapper à la guerre, sans ravitaillement et sans munition, des hordes de soldats russes abandonnent positions, armes et bagages sur le territoire ottoman. Elles s'en retournent à leurs foyers, pillant et assassinant au passage, portant le désordre sur tout le Sud de l'ex-Empire russe. L'ancienne administration tsariste s'est évanouie dans la nature. Les chemins de fer ne fonctionnent plus, les rails sont souvent arrachés. Les routes ne sont plus entretenues, elles se défoncent. Les ponts se délabrent. La Transcaucasie post-tsariste s'isole et sombre dans l'anarchie".

(3) La fracture est réelle au sein des sociaux-démocrates transcaucasiens. Les uns emmenés par Nicolas Cheïdzé et Irakli Tsérétéli souhaiteraient rester fidèle à la stratégie de la "ligne politique dite russophile". Les autres emmenés par Akaki Tchenkéli, rejoignant ainsi certains mouvements nationalistes, voient dans la "ligne politique dite germanophile" le moyen tactique de résister à l'Empire ottoman. Le président du groupe social-démocrate à la SEIM, Noé Jordania, et sa majorité laisseront faire Akaki Tchenkéli, espérant que la situation se retournera en Russie bolchévique.

(4) La Ière République de Géorgie (1918-1921)

(5) La République démocratique d'Arménie (1918-1920)

(6) La République démocratique d'Azerbaïdjan (1918-1920)

*

Sources multiples :

-  Géorgie, bibliographie : histoire, témoignages et romans historiques

-  Internet dont David Marshall Lang, Levan Urushadze, Marxists, Wikipedia.

Voir aussi :

-  L'Empire russe et les Géorgiens (1801 - 1917)

-  Géorgie : les partis politiques avant 1991

-  Géorgie, Russie et France : Nicolas Cheïdzé (1864-1926), homme d'État russe et géorgien

-  Géorgie et France : Evguéni Guéguétchkori (1881-1954), homme d'Etat transcaucasien

-  Géorgie, Suisse et France : Noé Jordania (1868-1953), président des 2e et 3e gouvernements de la Ière République

-  Azerbaïdjan : Mamed Emine Rassoul Zadé (1884-1955), homme politique

-  Géorgie et France : Akaki Tchenkéli (1874-1959), homme d'Etat transcaucasien

-  Géorgie, Russie, France et Etats-Unis : Irakli Tsérétéli (1881-1959), homme d'État



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