Les enfants des rues : un phénomène endémique en Russie (2003)
lundi 28 avril 2003
Les enfants des rues : un phénomène endémique en Russie
Un, deux, trois millions d'enfants dans les rues, personne n'est capable d'évaluer l'ampleur de ce gigantesque "fait de société". Ils font partie du nouveau visage de la société russe et sont acceptés comme un phénomène certes gênant, mais tout aussi inévitable que la fonte des neiges au printemps.
La rue devient l'asile d'enfants souvent très jeunes, âgés de moins de dix ans et parfois seulement de deux ou trois. Sous leurs airs de caïds, ils sont aussi fragiles et vulnérables que n'importe quel enfant et ne recherchent que l'attention et la tendresse des adultes. À défaut de les trouver, ils s'organisent une microsociété avec ses règles, sa hiérarchie, son rythme de vie partagé entre de petits travaux et de petits trafics, et ses paradis artificiels pour échapper à la violence de cet univers.
Seulement 13.5 % de ces enfants des rues sont orphelins. Les autres quittent leur foyer pour cause de conflits familiaux, de violences parentales à leur égard ou parce qu'ils grandissent dans l'indifférence. Environ 1/3 des enfants racontent que leurs parents ne se sont jamais occupés d'eux. 10 % ont un de leurs parents qui séjourne en prison, 32 % ont des parents privés de leurs droits parentaux. 1/3 disent avoir au moins un parent atteint d'alcoolisme chronique, un autre tiers que leurs deux parents s'enivrent presque chaque jour. 4 % n'ont jamais fréquenté l'école.
La loi interdit le travail des enfants. Pour survivre, beaucoup d'enfants des rues travaillent en mettant en danger leur vie et leur santé, leur développement physique et moral. Les garçons s'emploient comme porteurs, éboueurs, laveurs de voitures alors que les filles sont vouées à l'exploitation sexuelle. Les enfants doivent fournir de gros efforts physiques quand ils travaillent pour un employeur et subir toutes sortes de chantages quand ils sont aux mains de la mafia.
Le 14 janvier 2002, Vladimir Poutine s'est inquiété du sort de ces enfants, "phénomène qui porte atteinte à la sécurité du pays et à sa stabilité sociale". En février, le vice-premier ministre a présenté au Parlement un programme de huit millions de dollars pour la création d'une banque de données, le renforcement des responsabilités parentales, la reconduction des enfants au domicile familial et la création d'orphelinats et de foyers pour les enfants des rues.
Pour pallier l'insuffisance des réponses publiques, un certain nombre d'associations de solidarité se sont mises en place, dans des conditions matérielles difficiles, mais avec une efficacité prouvée.
(Extraits du bulletin n° 105 de mars 2002 de l'ACER-Russie, repris par la Lettre du COLISEE n° 34, p. 13)
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