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Nationalismes : "Quels remèdes ? " (6/6)


mercredi 30 avril 2003, par Hervé Collet

 

QUELS REMEDES AUX NATIONALISMES ?


Sur la base des analyses précédentes, les solutions à apporter sont de deux ordres :
-  politique : action sur les structures.
-  éducatif : action sur les mentalités.

1. L'action sur les structures

Partant du constat selon lequel il n'existe pas de fanatisme sans "fanatiseur", et que les leaders intégristes ou messianiques exploitent les mécontentements populaires nés de besoins économiques, sociaux ou culturels non satisfaits, l'intervention d'ordre politique visant à prévenir ou à "guérir" le fanatisme peut rechercher deux buts :

-   Lutter contre les leaders ou les groupes dominants qui fanatisent les populations frustrées

Contentons-nous de rappeler qu'il y a la manière forte, du genre "guerre du Golfe" ou "intervention en Afghanistan" et la manière plus "feutrée", qui consiste à s'appuyer sur l'opinion publique, nationale ou internationale pour dénoncer les méthodes utilisées par les leaders intégristes, fanatiques ou messianiques.

-  Répondre aux vrais besoins de la population considérée

Certes, c'est un tout un programme, mais il ne paraît pas possible de contrer durablement le fanatisme sans résoudre les problèmes de fond qui sont à la source du mécontentement populaire qui l'alimente. C'est le cas, actuellement des "banlieues explosives", mais aussi des populations sous alimentées ou réprimées des pays en développement, dont la tentation est de se réfugier dans une idéologie qui leur redonne espoir et dignité.

2. L'action sur les mentalités

On pourrait dire que toute action éducative est susceptible de lutter contre le fanatisme. Mais ce serait méconnaître la vocation naturelle de toute idéologie à se reproduire par l'éducation. Et les exemples ne manquent pas de populations ayant un degré élevé de culture, qui succombent pourtant à la tentation fanatique. On est donc en droit de se demander quel type d'éducation peut contribuer à favoriser l'accueil de l'altérité et à combattre le fanatisme.

Osons quelques propositions :

Une certaine conception de la laïcité

Contrairement aux combats d'arrière-garde qui fondent la laïcité sur l'éradication de tout phénomène religieux, on pourrait définir l'attitude laïque comme une démarche qui prend en compte toutes les composantes de la personnalité de l'homme, et donc sa dimension spirituelle, mais qui veille à deux éléments déterminants :
-  Le refus de donner une définition officielle du bonheur. Tous les "maux" que nous avons dénoncés à travers l'étude de l'intégrisme, du fanatisme et autres messianismes, proviennent du fait qu'un groupe d'hommes tente d'imposer aux autres "ce qu'il faut faire pour être heureux". Ayons le courage d'accepter le droit (le devoir ?) de tout être humain à trouver lui-même sa propre définition du bonheur. C'est le fondement de toute démocratie véritable
-  La séparation du spirituel et du temporel, du profane et du sacré, des Eglises et de l'Etat. Cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas exister de liaisons entre ces deux dimensions, mais la confusion de ces deux plans est à l'origine de toutes les intolérances religieuses de l'Histoire. Là encore, la liaison entre le ciel et la terre doit faire l'objet d'un choix libre.

Une pédagogie du projet

Dire que tout homme doit trouver lui-même son propre "chemin de bonheur", ne résout rien en soi, car beaucoup de gens ne savent pas :
-  Discerner ce qui est susceptible de les rendre heureux : comment reconnaître ses "vrais" besoins, ceux qui peuvent être satisfaits d'une manière profonde et durable ? Il n'est pas sûr, à cet égard, que le marketing apporte une solution idéale.
-  Mettre en œuvre les moyens pour y parvenir : problème de savoir et de savoir-faire, si possible par soi-même.

D'où une pédagogie du projet, qui repose sur une pédagogie de l'autonomie et d'apprentissage de la responsabilité.

Une démarche "thérapeutique"

Elle repose sur le constat que le fanatisme et autres formes du refus de l'altérité constituent des scénarios d'échec, qui se traduisent par :
-  La recherche de compensations privilégiant l'avoir au dépens de l'être, la consommation au détriment de l'intériorité.
-  La quête du pouvoir sur l'autre, avec son cortège de "dommages collatéraux" : compétition poussée à l'excès, esprit de vengeance, etc
-  La fuite en avant, le désespoir.

C'est cette aliénation profonde qui nourrit toutes les déviances sociales, et que combattent les approches démocratiques, en s'appuyant notamment sur les sciences humaines. Leur vulgarisation au sein de l'éducation et de la "société civile" est une nécessité vitale.

L'apprentissage de la véritable rencontre interculturelle

Le refus de l'altérité ne peut se combattre en profondeur sans une authentique rencontre. Beaucoup de conflits interethniques ont pu être évités ou atténués par des programmes pédagogiques visant la connaissance mutuelle et la tolérance. Rappelons le rôle majeur qu'a pu jouer l'Office franco-allemand de la Jeunesse dans le rapprochement entre les deux nations traditionnellement antagonistes. C'est en partie faute de programmes de ce genre que le conflit macédonien a eu l'ampleur que l'on sait.

Encore faut-il que la rencontre interculturelle ne se limite pas à des éléments d'ordre folklorique, où à des échanges "de surface" (banquets, matches, etc), mais soit l'occasion d'un approfondissement, autant de ce qui divise que de ce qui unit.

Hervé Collet, sociologue, rédacteur en chef du site Internet du COLISEE.



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