Le premier tour de l'élection présidentielle d'Ukraine consacre une coupure politique du pays en deux (novembre 2004)
mercredi 3 novembre 2004, par Hervé Collet
Plus de 37 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dimanche 1er novembre pour le premier tour de l'élection présidentielle en Ukraine. Le taux de participation à cette élection a été l'un des plus forts de ces dernières années avec 74,48 %.
Selon des résultats quasi-définitifs publiés lundi soir par la Commission électorale centrale, le premier ministre sortant, Viktor Ianoukovitch a obtenu 39,88 % des voix, devançant de peu le candidat de l'opposition Viktor Iouchtchenko, qui atteint 39,22 % malgré de nombreuses irrégularités et des pressions venant du pouvoir (utilisation des "ressources administratives"). Comme le prévoit la constitution, seuls les deux candidats les mieux placés peuvent se présenter au second tour, prévu le 21 novembre prochain.
Deux candidats d'opposition ont recueilli chacun 5 % environ et pourraient faire pencher la balance en faveur de Viktor Iouchtchenko. Le chef du Parti socialiste, Olexandre Moroz est en effet arrivé troisième avec 5,77 % des suffrages exprimés, suivi du chef du Parti communiste, Petro Simonenko (5,20 %). Mais ce dernier est connu pour ses positions pro-russes et ses voix iront probablement à M. Ianoukovitch. Les voix de M. Moroz, opposant modéré au régime pourraient aller à M. Iouchtchenko et équilibrer ainsi le soutien apporté par le parti communiste au candidat du pouvoir. Le scrutin s'annonce donc très serré et l'on craint que le pouvoir use de tous les moyens en sa possession pour fausser le résultat issu des urnes. Les observateurs internationaux ont déjà jugé le scrutin du premier tour non conforme aux normes démocratiques. "Nous devons conclure que, sur la base de nos observations, l'élection présidentielle 2004 n'a pas répondu aux normes de l'OSCE, du Conseil de l'Europe et de nombreuses autres normes pour des élections démocratiques", a déclaré Geert Ahrens, chef de la mission de 600 observateurs de l'OSCE. L'ONG ENEMO, qui regroupe des observateurs des pays d'Europe de l'Est et de l'ex-URSS, a affirmé avoir observé elle aussi de "sérieuses irrégularités", rapportant notamment des pressions exercées sur des étudiants et des erreurs dans les listes électorales.
Les votes se sont par ailleurs répartis selon les divisions traditionnelles de l'Ukraine, entre l'ouest et l'est du pays. M. Ianoukovitch, qui a bénéficié de l'appui des médias ukrainiens les plus influents et du soutien du Kremlin, a obtenu des scores de près de 90 % dans les régions russophones de Donetsk et Louhansk (est). Son adversaire pro-occidental a pour sa part fait des scores similaires dans les régions de Lviv et d'Ivano-Frankivsk (ouest), ukrainophones et hostiles à la Russie. Il a également bénéficié d'un fort soutien à Kiev et sa région. Le pays se trouve, une fois encore, coupé politiquement et géographiquement en deux.
Hervé Collet, d'après des dépêches d'agences.
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