Pologne : le Parlement Européen soutient le député européen Bronislaw Geremek, menacé d'être déchu de son mandat
jeudi 26 avril 2007
Avant sa session de votes, le Parlement a débattu le mercredi 25 avril de la situation juridique du député Bronislaw Geremek à propos de la menace de remise en cause de son mandat en Pologne. Le vice-président Pierre Moscovici a déclaré à l'Assemblée plénière que le Parlement n'avait jusqu'ici reçu aucune communication officielle des autorités polonaises.
Le débat a commencé quand le président du groupe ADLE, Graham Watson, a fait une motion d'ordre : "Je prends la parole parce qu'un membre de mon groupe, M. Geremek, va voir son mandat de parlementaire européen retiré par son propre gouvernement avec effet au 19 avril. Le gouvernement polonais retire le mandat de M. Geremek en s'appuyant sur la loi de contrôle adoptée il y a tout juste deux ou trois mois et actuellement sous procédure judiciaire à la Cour constitutionnelle de Pologne. Cette loi exige que tous les journalistes, universitaires et parlementaires élus signent une déclaration énonçant qu'ils n'ont jamais collaboré avec les services de sécurité de l'ère communiste. M. Geremek a signé ces déclarations dans le passé. Son refus de signer dans le cas présent est fondé sur des principes éthiques plutôt que sur des raisons politiques. Il s'oppose justement à la chasse aux sorcières de son gouvernement."
Après des applaudissements nourris, Graham Watson a poursuivi : "Je demanderais trois choses, tout d'abord si M. Kaczynski, qui a rencontré M. Pöttering la semaine dernière, a soulevé cette question, deuxièmement, s'il est juste et envisageable qu'un membre de cette Assemblée soit dépouillé de cette façon de son mandat alors qu'il est élu démocratiquement et troisièmement, si vous comptez donner à l'Assemblée plénière l'assurance que le Parlement agira le plus rapidement possible pour protéger M. Geremek et lui permettre d'exercer démocratiquement son mandat."
D'autres responsables de groupes politiques ont donné leur avis. Pour les socialistes européens, Martin Schulz (DE) a déclaré : "J'aimerais dire à M. Geremek : nous ne partageons pas toutes vos vues, mais sur ce point vous pouvez compter sur la solidarité illimitée de l'ensemble de notre groupe et je suis sûr du Parlement quand il est question de résister à un gouvernement qui poursuit les personnes de l'Union européenne qui se sont battues dans leur propre pays pour le développement démocratique et la liberté de la Pologne. C'est un scandale qu'un grand pays comme la Pologne et son gouvernement agissent de la sorte. Je m'attends à ce que le Président du Parlement dise au gouvernement Kaczy ?ski demain que nous nous attendons à ce que le gouvernement polonais protège le parlementaire européen, M. Geremek, et nous mesurerons tout ce que la Pologne fera à l'avenir en fonction de la manière dont elle traitera ce collègue".
Selon Daniel Cohn-Bendit, co-président du groupe Verts/ALE, "ce Parlement n'a qu'une position à défendre : si un gouvernement emploie des méthodes staliniennes ou fascistes, nous devons protéger notre collègue sans hésitation contre tous les fous de ce Parlement. Nous sommes solidaires, non seulement nous sommes d'accord avec M. Geremek mais nous avons pendant des années combattu le stalinisme avec lui et c'est pour cela que ce Parlement doit être intraitable".
Francis Wurtz (GUE/NGL) a déclaré qu'il lui était arrivé et qu'il lui arrivera encore de "s'opposer politiquement à M. Geremek". Le président du groupe GUE a ajouté qu'il n'en était que plus à l'aise pour lui exprimer "son profond respect pour le courage politique dont il a fait preuve" et l'a assuré, au nom de son groupe, de "sa totale solidarité".
Le président du groupe PPE-DE, Joseph Daul, a rappelé que "chaque collègue ici présent, de quelque parti que ce soit, jouit de l'immunité parlementaire !" Il a ajouté que, pour le moment, il n'y avait ni demande, ni analyse juridique, comme l'a indiqué Giuseppe Gargani. "M. Geremek bénéficie de tout notre soutien et je lui confirme aussi le soutien du parti populaire européen. Nous respectons les règles juridiques dans ce Parlement, pour tous les parlementaires ! Et aussi pour M. Geremek !" a-t-il conclu.
Le président de la commission des Affaires juridiques, Giuseppe Gargani a déclaré : "J'aimerais assurer les collègues que lorsque cette question arrivera devant ma commission, je ferai preuve de la plus grande sensibilité en ce qui concerne l'indépendance du Parlement et nous examinerons la correspondance et les documents très soigneusement dans l'optique de donner la possibilité aux membres du Parlement de défendre leur indépendance et leur liberté."
Le vice-président Pierre Moscovici, président de séance pour cette session de vote, a souligné : "Nous n'avons pas reçu aujourd'hui notification de cette décision du gouvernement polonais, qui, par ailleurs, est plus que contestable. Le rôle du Parlement est de garantir et de protéger la fonction parlementaire exercée par l'un des siens". Il a tenté de clore le débat mais, sur fond de protestations et de chahut, confronté à la demande de nombreux députés désireux de prendre la parole, il a invité les deux responsables de groupes politiques qui n'étaient pas encore intervenu à le faire, à savoir Brian Crowley du groupe UEN et Bruno Gollnisch du groupe ITS.
Brian Crowley a estimé qu'il était injuste de ne pas inviter son vice-président Kaminski qui avait indiqué vouloir s'exprimer sur la question. "Peu importe que vous soyez d'accord ou en désaccord avec lui, vous avez donné à d'autres le droit de parler et il aurait dû l'avoir aussi. Certaines personnes dans cet hémicycle ont une interprétation différente de celle des orateurs précédents. Il fallait leur donner l'opportunité de l'exprimer au même moment."
Pour le président du groupe ITS, Bruno Gollnisch, il faut découvrir dans quelle mesure, M. Geremek était peut-être complice des activités stalinistes de "ce totalitarisme abominable". Il a dénoncé "la géométrie variable" qui est souvent la règle pour ce qui concerne la défense des parlementaires européens, faisant référence à des cas où lui et d'autres membres de son groupe ont fait face à des actions en justice : "Vous avez alors fait référence à la souveraineté nationale", a-t-il fait remarquer.
Pierre Moscovici a conclu la discussion en ces termes : "La conférence des présidents examinera cette question demain. Je suis sûr qu'il y aura une large majorité au sein du Parlement européen pour soutenir M. Geremek et j'entends maintenant exprimer ma propre solidarité avec lui."
Source : communiqué du service de presse du Parlement Européen.
REF. : 20070425IPR05853
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