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Géorgie : Mikheïl Saakachvili propose un plan de paix pour l'Ossétie du Sud (2004)
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A LA 59ÈME ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES NATIONS UNIES

vendredi 24 septembre 2004, par Mirian Méloua

Après s'être rendu le 3 janvier 2004, la veille de son élection, à Tskhinvali, capitale de l'Ossétie du Sud en sécession et avoir proposé le 26 mai 2004 à Tbilissi un premièr projet de réintégration à la Géorgie avec garantie d'autonomie, le président géorgien a fait le 21 septembre 2004 à New York une deuxième proposition de plan de paix.

Malgré les lettres personnelles (dont celle du 6 septembre afin d'obtenir la libération de deux journalistes géorgiens arrêtés "par erreur" en Ossétie du Nord), malgré la rencontre en tête-à-tête du 17 septembre à Astana, capitale du Kazakhstan, au sommet des Chefs d'Etat de la CEI, malgré les entretiens téléphoniques (dont celui du 18 septembre), les relations entre Mikheïl Saakachvili et Vladimir Poutine sont au plus bas. Le président russe a annulé le voyage qu'il devait faire à Tbilissi à l'automne. L'état de grâce du président géorgien aux yeux de Moscou est passé.

Vladimir Poutine a trouvé avec les évènements de Beslan (Ossétie du Nord) un argumentaire proche de celui de George W. Bush après le 11 septembre 2001. Afin de sauvegarder les intérêts de la Russie, il est prêt, avec les services de sécurité et les forces militaires russes, à frapper à l'étranger. Les séparatistes tchétchènes sont pour lui des terroristes, ceux d'Ingouchie ou du Daguestan le seraient également s'ils se manifestaient. La Russie est déjà présente en Ossétie du Sud, il est fortement probable que l'espace aérien de la Géorgie a été violé à plusieurs reprises ces derniers jours par la Russie, le 14 septembre dans les gorges de Kodori par 4 hélicoptères militaires Mi-8 et le 19 septembre à Chatili par un avion militaire.

D'ailleurs le 6 septembre, à Novo Ogarevo, lors d'une conférence de presse devant des journalistes et des experts occidentaux, le Président Poutine n'avait pas caché son ressentiment vis-à-vis de la Géorgie du temps d'Edouard Chevardnadzé et la Géorgie présente de Mikheïl Saakachvili, "fauteurs de troubles dans le Sud Caucase" d'après lui. Il a tenu à rappeler que la Géorgie avait demandé la mise en place de la "force de paix" russe en Ossétie du Sud en 1992, que les contingents ossètes, russes et géorgiens y avaient été limités chacun à 500 hommes par accord, et que Mikheïl Saakachvili n'avait pas hésité à y envoyer ces dernières semaines 3000 hommes supplémentaires. L'intervention diplomatique américaine avait en définitive permis le retrait des forces armées géorgiennes, et d'éviter la guerre.

Vraie ou fausse, cette lecture des évènements d'Ossétie du Sud montre que la position de la Russie n'a pas changé, au contraire qu'elle s'est durcie après Beslan. Tout en ne contestant pas officiellement l'appartenance du territoire d'Ossétie du Sud à la Géorgie, elle estime avoir un rôle privilégié à y jouer. Les Ossètes du Sud (à passeports russes depuis quelques années) ne souhaitent pas réintégrer la Géorgie ; ils demandent protection à la Russie, utilisent la langue russe et le rouble comme monnaie. La médiation de la Russie pour la paix, sa présence militaire, son contrôle du tunnel sous le grand Caucase (passe de Roki entre Ossétie du Nord et Ossétie du Sud) sont donc indispensables. Le statu quo établi depuis 13 ans, ni réintégration, ni indépendance officielle, serait la seule solution.

La position de la Géorgie, recouvrer l'intégrité de son territoire reconnu internationalement, n'a pas changé non plus.

La nouveauté vient du plan de paix en trois étapes présenté par Mikheïl Saakachvili aux Nations Unies le 21 septembre, et qui impliquerait la communauté internationale plutôt que la Russie seule :
-  1ère étape : construction d'un climat de confiance par échanges d'ONG, d'étudiants, de journalistes, de personnel médical, d'athlètes,
-  2ème étape : démilitarisation et décriminalisation,
-  3ème étape : établissement de garanties d'autonomie concernant la culture, la langue, le gouvernement régional, le contrôle fiscal et la représentativité au niveau du gouvernement national de la Géorgie.

La création d'une économie forte serait le ciment de la solution préconisée, et bénéficierait à toute la région du Caucase et de la Mer Noire.

La Russie avait répondu d'avance en critiquant l'action des observateurs de l'OSCE en Ossétie du Sud et en s'opposant à l'extension de leurs missions et de leurs effectifs. Les autorités ossètes de Tskhinvali ont fait rapidement savoir que ces propositions étaient aussi inacceptables que celles du 26 mai 2004, et que les vrais pourparlers s'engageront lorsque la Géorgie reconnaîtra l'indépendance de l'Ossétie du Sud.

La situation est bloquée, si une initiative diplomatique était nécessaire quelques semaines auparavant pour éviter la guerre, une initiative diplomatique est nécessaire pour gagner la paix. Les Etats-Unis, à l'approche de leurs élections présidentielles, ont certainement d'autres préoccupations, même si la Géorgie, en alliée fidèle, après avoir envoyé un contingent au Kosovo, doublé son contingent en Irak, envoi un contingent en Afghanistan.


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