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"Marie, dans l'Eglise orthodoxe" par le Père Elie Mélia (1966)
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ANCIEN RECTEUR DE LA PAROISSE SAINTE NINO DE PARIS

mercredi 15 août 2012, par Mirian Méloua

Cet exposé a été publié dans le Cahier d'Orgemont numéro 58 (novembre / décembre 1966)

Place de la Vierge Marie dans le culte et la piété populaire

Parmi les douze fêtes majeures de l'année ecclésiastique orthodoxe, quatre sont consacrées à la Théotokos, mot grec signifiant : celui qui a enfanté Dieu. Ce sont : la Nativité (8 septembre), la Présentation au Temple (21 novembre), l'Annonciation (25 mars) et l'Assomption (15 août). Il faut y ajouter le 26 décembre : Synaxe en l'honneur de la Théotokos, comme suite de Noël, le 1er octobre fête de la protection de la Théotokos et le 9 décembre sa conception par Sainte Anne.

Les nombreux groupes d'hymnes qui parsèment les offices de la liturgie orthodoxe se terminent invariablement par un hymne en l'honneur de la Mère de Dieu. L'hymne marial est chanté au cours de la Messe et à la fin de tous les autres offices

"Toi plus vénérable que les Chérubins et incomparablement plus glorieuse que les Séraphins, toi qui sans corruption as enfanté Dieu-le-Verbe, toi qui es véritablement Mère de Dieu, nous t'exaltons"

et l'hymne marial de la liturgie de Saint Basile proclame

"Ton sein est plus vaste que celui des cieux".

Les innombrables icônes de la Mère de Dieu, placées dans les églises ou dans les maisons privées, témoignent de la présence de la Mère de Dieu parmi le peuple chrétien dans la communion des saints et entretiennent la piété populaire.

La Vierge Marie dans la théologie orthodoxe

Le culte rendu à la "Toute-Sainte" ou "Toute pure Vierge" a suscité une cathéchèse appropriée en référence à la révélation divine et à l'économie du salut. Une certaine sobriété caractérise la théologie orthodoxe de cette question. L'Ancien Testament situe la Vierge Marie dans l'économie du salut, fil directeur de toute la Bible. Le seul dogme marial que connaît à ce jour l'Eglise orthodoxe est celui qui l'a proclamée à Ephèse en 432, Théotokos, c'est à dire celle qui a enfanté Dieu en opposition à l'hérésie Nestorienne qui ne reconnaissait à la Vierge Marie que le titre de Christotokos, Mère du Christ.

Les principaux textes mariaux du nouveau testament sont le récit de l'Annonciation et de la Nativité dans les évangiles selon Saint Matthieu et Saint Luc, la Visitation et le chant du Magnificat (Luc I, 39-55) ; la bénédiction du juste Siméon (Luc II, 34-35) ; le cri de la femme du peuple et la réponse du Sauveur (Luc XI, 27-28) et les paroles adressées du haut de la croix à la Vierge Marie et au disciple bien-aimé (Jean XIX, 26-27). Quand le Christ dit "Qui est ma Mère et qui sont mes frères" (Matthieu XII, 46-49 : Marc III, 31-35 ; Luc VIII, 19-21), Il exprime un appel au dépassement du plan physique et particulier au plan spirituel et universel. Selon une catéchèse développée dans les homélies des fêtes mariales, ce fut là la croix proposée à la Vierge Marie et qu'elle accepta de rendre sur elle dès avant sa maternité et que lui prédit le juste Siméon. Le rôle de la Vierge Marie est tout entier dépendant de l'acte sauveur de son divin Fils : sa croix est toute d'obéissance et d'effacement même, mais en vue d'un service. Aussi les Pères de l'Eglise comparent-ils sa lumière à celle de la lune reflétant le soleil, unique source de lumière.

Les Pères nomment encore la Vierge Marie seconde Eve. En effet, par un décret de sa souveraine liberté, Dieu n'a pas voulu opérer le salut des hommes sans leur libre participation et le fiat de la Vierge Marie à l'Annonciation est une réponse libre au nom de tous les hommes que Dieu appelle au salut. Selon la logique de la liberté dans notre condition terrestre, cette réponse humaine à la grâce révélée est le terme d'une pédagogie : toute la longue pédagogie de l'Ancien Testatment.

La Vierge Marie est ainsi la première dans le dialogue auquel Dieu appelle les hommes en vue du salut : elle est la première aussi bien dans l'ordre chronologique (dans le Nouveau Testament) que par la nature même de sa mission et que par la fidélité à sa vocation.

La Vierge Marie dans le dialogue oecuménique

Les orthodoxes doivent prendre au sérieux l'exigence de la maxime théologique chère aux protestants : "Soli Deo Gloria". Nous leur demandons en retour de comprendre que cette exigence n'est pas considérée comme contradictoire avec le culte des Saints.

La difficulté avec nos amis catholiques romains vient de leur doctrine de l'Immaculée Conception de Marie dans le sein de Sainte Anne signifiant une exemption du péché originel au bénéficie de la Vierge Marie par une anticipation des fruits de la Rédemption. Le dogme de 1854 ne nous parait pas conforme à la doctrine orthodoxe selon laquelle Dieu opère le salut avec la coopération, voulue et suscitée par lui-même, de notre libre-arbitre.

Voir aussi :

-  Géorgie et France : le Père Elie Mélia (1915-1988)

-  Dossier : la chrétienté orthodoxe en Europe (2010)


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