Géorgie : un suspect arrêté dans l'enquête sur la tentative d'attentat contre G.W. Bush (2005)
IL TUE UN POLICIER AVANT D'ÊTRE PRIS
jeudi 28 juillet 2005, par Mirian Méloua
Les Géorgiens avaient accueilli avec liesse G.W. Bush le 10 mai 2005, place de la Liberté, à Tbilissi. Les médias internationaux n'avaient pas toujours pris au sérieux la découverte d'une grenade à quelques mètres de la tribune officielle. L'enquête conjointe des agents du ministère de l'intérieur et du FBI permet de conclure aujourd'hui que le risque avait été réel.
10.05.2005
Après sa visite à Moscou, afin de célébrer l'anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale, George W. Bush reçoit un accueil chaleureux à Tbilissi ; il participe, avec Mikhaïl Saakachvili, à une manifestation populaire qui réunit plusieurs dizaines de milliers de personnes. Une heure après son départ, une grenade armée mais non explosée est découverte Place de la Liberté.
11.05.2005
Guéla Bezhuachvili, secrétaire du Conseil National de Sécurité de la Géorgie, informe que la grenade à main est de fabrication soviétique (RPG-5) et qu'elle a été retrouvée à 50 mètres de la tribune officielle. Le ministre de l'intérieur, Vano Mérabichvili, confirme.
Scott McClellan, porte-parole de la Maison-Blanche, déclare "Bush n'était pas en danger. Il a été informé après son départ de Tbilissi. Le FBI travaille en collaboration avec la police géorgienne".
16.05.2005
Une récompense de 20 000 lari est proposée aux personnes qui pourraient apporter des informations fiables.
18.05.2005
Le chargé d'affaires de l'ambassade des Etats-Unis à Tbilissi, Bryan Paarmann, déclare que "la grenade a été retrouvée à 30 mètres de la tribune officielle, cachée dans un mouchoir sombre et qu'elle n'a pas explosé pour un défaut de fonctionnement".
21.05.2005
Un consultant militaire, Irakli Aladéïchvili, déclare dans la presse que la grenade n'est pas la RGD-5 de fabrication soviétique, mais une version modifiée produite durant la guerre du Karabakh en Arménie, d'un poids voisin de 310 grammes. La grenade incriminée est marquée D-100-4003, elle a été produite en 2003. Parmi les défauts de fonctionnement possible, l'hypothèse de la faiblesse d'un ressort est avancée.
18.07.2005
Le ministère géorgien de l'intérieur diffuse la photographie d'un suspect non identifié. Il s'avèrera plus tard qu'elle a été prise sur la Place de la Liberté par un photographe polonais et que près de 10 000 personnes ont été interrogées.
La récompense en cas d'information est revalorisée à 150 000 lari (80 000 dollars). Il s'avèrera plus tard que plusieurs témoins, dont l'identité n'a pas été publiée, en ont bénéficié.
20.07.2005
Vladimir Aroutounian, 27 ans, est arrêté dans son appartement, à Vachli Djvari, faubourg de Tbilissi. Il tue un policier, Zourab Klividzé, 37 ans, avant d'être lui même blessé et maitrisé.
21.07.2005
Le ministère de l'intérieur diffuse une vidéo dans laquelle apparaît l'appartement de Vladimir Aroutounian : livres militaires, uniformes, masques à gaz, grenades à main et matériel de vision nocturne y sont entreposés. Les officiels révèleront plus tard que des fusils d'assaut Kalachnikov sont également présents.
A la question posée en russe "Avez-vous lancé la grenade à main ?", le suspect répond "Oui ... parce que Bush".
23.07.2005
Vladimir Aroutounian est condamné à 3 mois de prison provisoire.
24.07.2005
Des précisions sont apportées par l'enquête : la grenade a été armée 2 minutes 30 secondes après le début du discours de George W. Bush, il est possible que le mouchoir qui l'enveloppait ait empêché le dispositif de fonctionner.
Une agence de presse russe révèle que, selon des sources proches du ministère géorgien de l'intérieur, Vladimir Aroutounian n'a pas pu ne pas bénéficier de complicité. Il disposait d'un faux passeport et aurait entretenu par le passé des contacts avec les anciennes autorités d'Adjarie ; il s'y trouvait d'ailleurs en mai 2004. La piste de l'implication de services secrets étrangers n'est pas écartée.
26.07. 2005
Vladimir Aroutounian est inculpé de terrorisme.
27.07.2005
Le procureur général Zourab Adéïchvili et le ministre de l'intérieur Vano Mérabichvili révèle que des substances dangereuses ont été découvertes, en quantité, chez Vladimir Aroutounian. Après analyse par des experts américains, elle auraient pu être utilisées pour des actes de terrorisme.
28.07.2005
Le chef de file du parti travailliste géorgien, mouvement d'opposition non représenté au Parlement, Chalva Natélachvili, déclare publiquement que l'attentat a été fomenté par les services spéciaux du président Mikhaïl Saakachvili afin de "redorer l'image d'un gouvernement décrédibilisé" (M. Natélachvili est coutumier de ce type de déclaration à l'emporte-pièce, NDLR).
La suite de l'enquête confirmera, ou infirmera, l'inculpation de Vladimir Aroutounian pour la tentative d'attentat contre G.W. Bush et l'existence éventuelle de complice. Il risque déjà l'emprisonnement à vie pour la mort d'un policier et la découverte d'armes de guerre et d'explosifs. Il peut être imaginé que son "degré de coopération" influera sur la sanction définitive.
Défaillance de goupille, faiblesse de ressort de déclenchement ou mouchoir bloqueur, quelle que soit la véritable cause technique de non-explosion, la grenade avait été réellement armée et il est établi qu'elle aurait pu blesser un grand nombre de personnes, dont les présidents Bush et Saakachvili. Quand au véritable instigateur, il est moins sûr qu'il soit connu un jour.
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