Géorgie et France : Dimitri Amilakvari (1906-1942), Lieutenant-colonel de la Légion étrangère
AMILAKHVARI
mercredi 24 octobre 2012, par Mirian Méloua
Dimitri Amilakhvari est né le 12 novembre 1906 à Bazorkino (1), un village d'Ossétie, dans une famille noble géorgienne, les Zedguinidzé. Elle avait reçu la charge héréditaire d'Amilakhor, gardienne de la forteresse royale de Gori : ce nom de fonction avait rapidement supplanté le nom de famille.
L'émigration vers la France et la formation militaire
Après l'invasion de la Géorgie par l'Armée rouge en 1921, Dimitri émigre avec ses parents à Constantinople, puis en France. Il entre à l'école militaire française de Saint-Cyr en 1924 et en sort sous-lieutenant en 1926.
Souhaitant conserver la nationalité géorgienne, il se tourne vers la Légion étrangère. Son frère ainé Constantin (1904-1943) s'y engage également en 1928, sous un pseudonyme.
L'Afrique du Nord
Dimitri Amilakhvari est tour à tour affecté au 1er Régiment étranger à Sidi-Bel-Abbès en 1926, au 4ème Régiment étranger à Marrakech en 1929. Il participe ensuite aux combats du Haut Atlas et obtient deux citations en 1932 et 1933. Il dirige l'école militaire d'Agadir de 1934 à 1937 et accède au grade de capitaine. Il rejoint ensuite le 1er Régiment étranger où il commande la compagnie d'instruction de mitrailleuses.
Le 27 février 1940, il est nommé commandant d'une compagnie de la 13ème demi-brigade de Légion étrangère créée à Sidi-Bel-Abbès.
La courte campagne de Norvège et l'appel de Londres
Le 6 mai, après une étape en France, il participe au combat de Narvik en Norvège et obtient trois nouvelles citations.
Le 20 juin, après un retour en France, contraint par l'avancée allemande, il part pour la Grande-Bretagne avec quelques officiers.
La campagne d'Afrique et la mort
Le 31 août, il est envoyé en Afrique, où il commande une compagnie du 1er Bataillon de Légion étrangère : la campagne le mène au Gabon, au Cameroun, en Erythrée (batailles de Keren en mars et de Massaouah en avril 1941).
Il est promu durant la campagne de Syrie, chef de bataillon le 25 juin et lieutenant-colonel le 25 septembre : il reçoit le 19 Octobre le commandement et le drapeau de la 13éme Demi- Brigade de Légion étrangère des mains du général Catroux.
En mars 1942, son unité est engagée dans la campagne de Libye. Le 26 mai, à la bataille de Bir Hakeim, il commande la Ière Brigade française libre sous les ordres du général Koenig et s'y illustre à la tête d'une unité tactique de destruction de chars allemands (3). Le 10 août, il reçoit à El Tahag en Egypte la Croix de la Libération des mains du Général De Gaulle (4).
En octobre, il engage la 13ème DBLE à la bataille d'El Alamein en Egypte. Le 24, lors de la prise d'un piton, Dimitri Amilakhvari est tué d'un éclat d'obus (5).
Une vie au service de la France
Il a reçu de nombreuse décorations, chevalier de la Légion d'Honneur, Compagnon de la Libération, Croix de guerre 1939-1945 avec palmes, Croix de guerre des TOE (2 citations), Croix de guerre norvégienne (roi Haakon, en exil à Londres).
La 141ème promotion de l'Ecole militaire de Saint-Cyr (1954-1956) porte son nom.
Une mémoire qui se perpétue
Le 13 novembre 2004, lors de la IIème journée franco-géorgienne de Leuville-sur-Orge, le général Jean-Pierre Faure, de la promotion "Amilakvari", rappelait avec émotion le combat des officiers d'origine géorgienne dans les rangs de l'armée française durant la Seconde guerre mondiale. Il était également rappelé que le père du maire de la commune, Daniel Esprin, servit sous les ordres du lieutenant-colonel Amilakhvari à El Alamein : le premier fut blessé, le second trouva la mort.
Le 26 mai 2006, afin de rendre hommage à Dimitri Amilakhvari, une unité française militaire participait pour la première fois à la fête nationale géorgienne, l'orchestre du 43ème Régiment d'infanterie de l'armée de terre.
Le 19 novembre 2006, dans sa ville natale de Gori, à l'occasion du 100ème anniversaire de sa naissance et du 50ème anniversaire de la promotion "Amilakvari", une rue était inaugurée à son nom ainsi qu'une exposition au musée ethnographique. Le gouverneur de la région et l'ambassadeur de France avaient convié sa famille (dont sa fille venue de France) ainsi que des officiers français de la promotion "Amilakvari".
Le 30 janvier 2008, à Tbilissi, un film documentaire sur la vie de Dimitri Amilakhvari était présenté au cinéma Dom Kino.
Le 17 mars 2008, à Paris, aux Invalides, lors des cérémonies d'hommage aux "poilus" de la guerre de 1914-1918, devant le cercueil du dernier d'entre eux, Lazare Ponticelli, d'origine italienne et membre lui aussi de la Légion étrangère, une phrase était prononcée "Nous les étrangers, n'avons qu'une seule façon de prouver à la France notre gratitude pour l'accueil qu'elle nous a réservé : nous faire tuer pour elle", phrase que Dimitri Amilakhvari avait écrite sur son journal de campagne à Bir Hakeim.
Le 24 octobre 2012, une cérémonie religieuse est célébrée en l'église Sainte Nino de Paris pour le 70ème anniversaire de sa mort, en présence de sa famille, d'une délégation de la promotion 54/56 de Saint Cyr qui porte son nom et d'une délégation de l'Association géorgienne en France.
Notes
(1) Sur le plan de l'Etat-Civil, Dimitri Amilakhvari est né à Gori, le certificat de baptême a certainement tenu lieu de certificat de naissance. La date du 31 octobre 1906 est parfois retenue comme date de naissance : elle peut être attribuée à la différence entre le calendrier julien et le calendrier grégorien.
(2) Constantin Amilakhvari quitte la Légion étrangère en 1941 avec le grade d'adjudant. Il s'engage ensuite dans la Légion des Volontaires français contre le bolchévisme : il combat sur le front de l'Est, est grièvement blessé et meurt en 1943.
(3) L'unité tactique commandée par le lieutenant-colonel Amilakhvari, très mobile dans le désert et destructrice de chars, était composée d'infanterie motorisée, de batterie d'artillerie tractée, d'automitrailleuses, de canons antichars et de DCA.
(4) "Formidable entraîneur d'hommes, il s'attache alors à réorganiser son unité et à la préparer à la guerre du désert", d'après l'Ordre de la Libération.
(5) Dimitri Amilakhvari est inhumé sur les pentes du piton d'Himeimat. Son képi est conservé au Musée de la Légion étrangère d'Aubagne.
Voir aussi
Site de la promotion 54/56 de l'Ecole militaire de Saint Cyr :
http://www.promos5456.com/index.html.
Video en ligne le 24 octobre 2013, en langue géorgienne :
"Dimitri Amilakhvari, le Croisé de la Liberté"
http://www.youtube.com/watch ?v=Eo9x...,
"Dimitri Amilakhvari"
http://www.youtube.com/watch ?v=ce_-....
Sources multiples
dont
France, bibliographie (ouvrages sur la communauté géorgienne)
famille Amilakhvari,
Ordre de la Libération,
Wikipédia.
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