Accueil Brèves Plan du site Contact Admin


COLISEE Articles
comité pour l’information sur l’Europe de l’Est
   
 
 
[ Imprimer cet article ]


Géorgie : les chants polyphoniques


VERSION INITIALE PUBLIÉE LE 21 AVRIL 2004
vendredi 1er février 2013, par Mirian Méloua

Les chants polyphoniques remontent à l'ère préchrétienne. Les voix humaines se substituaient aux instruments de musique peu élaborés. Une première voix assure la ligne mélodique principale, les autres voix répondent, accompagnent et donnent du volume au chant. La Géorgie, terre d'invasion des grands voisins perses, mongols, ottomans et russes, a su préserver son identité culturelle en se réfugiant dans certaines traditions fortes ... et souvent dans les hautes montagnes du Caucase comme la province de Svanétie.

 

La polyphonie hier


Les prières à quelques dieux païens, les départs à la guerre, les enterrements, les mariages, les naissances, le travail des champs, le travail domestique ... l'amour ... étaient accompagnés de chants polyphoniques. Ils constituaient parfois une chronique musicale des scènes de la vie quotidienne, tentative de séduction, réprimande de la belle-mère, dispute avec le voisin.

Bien que la Géorgie fût christianisée au IVéme siècle par Sainte Nino, sous le règne du roi Mirian, les chants polyphoniques d'origine païenne continuèrent à y être chantés et s'adaptèrent à la nouvelle croyance. Sainte Nino ayant confectionné la première croix chrétienne à partir de sarments de vigne, les églises géorgiennes portent souvent le symbole de la grappe de raisin : certains chants polyphoniques y font référence ("chen khar venakhi").

Il convient également de noter que les spécificités régionales ont donné naissance à des genres différenciés. Aux majestueux et lents chants de Kakhétie ("ourmouli" du conducteur de char à boeufs) s'opposent les joutes vocales de Gourie ("krimatchouli" mettant en compétition les voix masculines les plus hautes), aux chants religieux de Kartlie s'opposent les mélodies vives d'Adjarie.

Les chants polyphoniques géorgiens se sont transmis au travers des siècles essentiellement par voix orale (1). Les plus anciens enregistrements datent du début du XXéme siècle (2). Les plus récentes écritures formalisées datent de quelques années. A l'époque soviétique, dans les années cinquante, le folklore géorgien fut magnifié par l'ensemble de danseurs et de chanteurs d'Iliko Soukhichvili et de Nino Ramichvili (3).

 

La polyphonie aujourd'hui


Les ensembles choraux de Géorgie

Depuis la restauration de l'indépendance de la Géorgie, en 1991, une multitude de choeurs polyphoniques s'est formée dans le monde.

Certains choeurs géorgiens ont trouvé des producteurs à l'étranger. Les héritiers de l'ensemble Soukhichvili, ballet national géorgien, ont continué leurs tournées internationales à travers le monde. L'ensemble Rustavi a renouvelé plusieurs générations de chanteurs (4). Les ballets Georgian Legend (5), issus du groupe EriSioni, se produisent régulièrement aux Etats-Unis, en Europe occidentale et en Russie, avec une partie chorale intensifiée.

Des choeurs féminins, plus particulièrement orientés vers les chants rituels, de naissance ou de funéraille, comme Kesane (avec Lela Tataraidze), Mzetamze (avec Nato Zumbadze) et Tutarchela (avec Tamar Buadze), se produisent depuis une dizaine d'années en France.

Des choeurs masculins, Simi (avec Revaz Guelachvili) (6), Antchiskhati (avec Malkhaz Erkvanidze), Basiani (avec Guiorgui Donadze) (7), Shavnabada (avec Davit Tsinstadze) (8), Shalva Chemo et Urmuli effectuent des tournées souvent estivales, dans le cadre de différents festivals ; ils viennent parfois ponctuellement en France comme Riho (9) .

Les chanteurs s'accompagnent de différents instruments de musique, le pandouri (luth à trois cordes), le tchangouri (luth à quatre cordes), le salamouri (longue flûte à bec, initialement utilisée par les bergers), le doudouki (sorte de hautbois pratiqué dans tout le Caucase, demandant une respiration continue), le doli (tambour à double face) et le garmoni (sorte d'accordéon) apparu au XIXème siècle.

Les ensembles choraux de France

Parallélement à ces choeurs quasi-professionnels de chanteurs géorgiens, des choeurs de chanteurs français intéressés par la polyphonie géorgienne se sont constitués en France : Artillac (10) dans le Sud Ouest, Marani (11) à Paris, Mzé Shina (12) dans l'Ouest pour les voix masculines, Irinola et Madrikali (13) à Paris pour les voix féminines, Harmonie géorgienne (14) et le choeur du Centre culturel géorgien LAZI à Paris (15) pour les voix masculines et féminines.

L'inscription au patrimoine oral et immatériel de l'humanité par l''UNESCO

Le 18 mai 2001, l'UNESCO inscrit les chants géorgiens au patrimoine oral et immatériel de l'humanité (16).

Le Symposium international de polyphonies de Tbilissi

Depuis quelques années, et afin de réunir tous ces ensembles vocaux le Conservatoire d'Etat de Tbilissi et le Centre international de musique populaire géorgienne organisent un symposium, alternant concerts et conférences. Il a lieu une année sur deux (17).

En 2002, du 2 au 9 octobre, des ensembles originaires du Japon (Yamashiro Gumi), d'Australie (Gorani), des Etats-Unis (Kavkasia), du Canada (Darbazi), de Grande-Bretagne (Maspindzeli), des Pays Bas (Biti Dobre), de Turquie (Matchakhela) et de France (Irinola) se sont produits, ainsi que des ensembles géorgiens de Tbilissi (Antshiskhati, Basiani, Mzetamze, Rustavi, ...) et de diverses provinces (comme Guria).

En 2004, du 23 au 30 septembre, le symposium s'est en partie déroulé à Ozourgueti en Gourie. Cette région du Sud Ouest présente une richesse particulière sur le plan vocal, alliant le traditionnel "krimatchouli" aux puissants chants d'incantation comme "batonebo" pour la guérison des enfants malades. Le choeur français Mze Shina y a participé.

En 2006, du 22 au 29 septembre, les choeurs géorgiens professionnels et les choeurs "familiaux" comme il en existe encore dans toutes les régions de Géorgie (familles Abesadze, Gogolashvili, Pirtsxalava, Sikharulidze, Urushadze,...) ont accueilli un nombre grandissant de choeurs étrangers. La France était représentée par Irinola et Marani.

En 2008, du 15 au 19 septembre, malgré la guerre russo-géorgienne d'août, la plupart des experts internationaux invités (Allemagne, Australie, Espagne, Estonie, France, Lettonie, Slovénie) ont tenu leur conférence. La plupart des concerts ont également été donnés.

En 2010, du 4 au 6 octobre, l'ensemble vocal français -originaire du Sud Ouest- "Le Remède de Fortune" y a participé.

En 2012, le 6ème symposium se tiendra du 24 au 29 septembre, à Tbilissi.

Les ateliers de polyphonie géorgienne en France

Si l'émigration géorgienne des années 1920 et 1940 a perpétué la tradition des chants polyphoniques en France (18), leurs descendants, et plus particulièrement Othar Pataridzé, ont formé au début des années soixante-dix une génération de chanteurs et de chanteuses au sein du choeur Merani (19).

Depuis plusieurs années, l'Association Artillac et Jean-Laurent Imianitoff organisent régulièrement des stages d'initiation et de perfectionnement dans le Sud-Ouest de la France.

L'Association Marani, initialement sous l'impulsion de Frank Kane, aujourd'hui sous celle de Bertrand Lambolez, propose des formations sur deux journées, généralement dans les locaux de l'Eglise géorgienne Sainte Nino de Paris. Ces formations sont animées par des maîtres de chant géorgiens venus de Tbilissi.

L'Association Mzé Shina, initialement sous l'impulsion de Laurent Stephan, aujourd'hui sous celle de Denise et Craig Shaffer, propose des initiations à la polyphonie géorgienne, dans l'Ouest de la France, mais également dans les autres régions françaises selon leur tournée de concerts.

L'Association Le Chant du Voisin sous l'impulsion de Cati Delolme, propose ponctuellement des initiations à la polyphonie géorgienne, dans le Sud-Est de la France, avec maître de chant venu de Géorgie.

 

Notes


(1) Géorgie : quelques exemples de chants polyphoniques

(2) "Drinking Horns and Gramaphones", 1902 -1914, The First Recordings in the Georgian Republic (Traditional Crossroads 80702-4307-2, USA).

(3) Géorgie : Tenguiz Soukhichvili (1938-2007), danseur et directeur de troupe

(4) Le chanteur emblématique de l'ensemble Rustavi, Hamlet Gonachvili, virtuose des chants kakhétiens, a disparu tragiquement en 1985. Voir Rustavi aujourd'hui http://www.singers.com/world/rustav....

(5) Géorgie : les ballets GEORGIAN LEGEND

(6) Géorgie : le choeur SIMI

(7) Polyphonies : l'ensemble géorgien BASIANI

(8) Polyphonies : l'ensemble géorgien SHAVNABADA

(9) Polyphonies : ensemble géorgien RIHO

(10) Polyphonies géorgiennes : association française ARTILLAC

(11) Polyphonies géorgiennes : l'ensemble français MARANI

(12) Polyphonies géorgiennes : l'ensemble français MZE SHINA

(13) Polyphonies géorgiennes : ensemble féminin français MADRIKALI

(14) Polyphonies : l'ensemble "HARMONIE GEORGIENNE", à Paris

(15) Le Centre culturel géorgien LAZI, à Paris

(16) UNESCO : inscription au patrimoine de l'humanité

http://www.unesco.org/bpi/intangibl....

(17) Site polyphonie géorgienne, en langues géorgienne et anglaise http://www.polyphony.ge

(18) Dans les années 1950, époque à laquelle la communication entre les diasporas à l'étranger et la Géorgie était impossible, l'actrice française d'origine géorgienne Maria Mériko et Victor Homériki enregistraient à Paris un disque 78 tours : "Oh ! Marguarita tchemo lamazo".

(19) Le choeur Merani était essentiellement composé de descendants d'émigrés géorgiens en France : il donna plusieurs concerts publics en France et en Grande-Bretagne, accompagné de danses traditionelles géorgiennes. Othar Pataridzé, et sa soeur Goulnara, s'étaient formés aux chants polyphoniques par tradition orale auprès des anciens : Choura Nakaïdzé avait animé le choeur de la paroisse Sainte Nino, Sergo Kokheïdzé avait transmis son savoir faire au pandouri, mais aucun d'entre eux ne disposait de formation musicale ou de partitions.

Photographie du choeur Merani :

http://www.samchoblo.org/agf_merani.htm.

Voir aussi :

-  Géorgie et France : Maria Mériko (1920-1994), née Alikhanachvili, comédienne

-  Victor Homériki (1910-1994), ancien président de l'Association géorgienne en France

-  Othar Pataridzé, président de l'Association géorgienne en France de 1986 à 1989.



[ Imprimer cet article ] [ Haut ]
 

 
 
  01. Accueil
02. Albanie
03. Arménie
04. Azerbaïdjan
05. Biélorussie
06. Bosnie-Herzégovine
07. Croatie
08. Géorgie
09. Kazakhstan
10. Kirghizstan
11. Macédoine
12. Moldavie
13. Monténégro
14. Ouzbékistan
15. Russie
16. Serbie
17. Tadjikistan
18. Turkménistan
19. Ukraine
20. Etats autoproclamés
21. Union européenne
22. Grandes régions d'Europe et d'Asie
23. Thèmes transversaux
24. Les séminaires et les conférences
25. Les dossiers du COLISEE

Contact
 

 
 
Dans la même rubrique

Autres articles :
Polyphonies géorgiennes : ensemble féminin français MADRIKALI
Polyphonies géorgiennes : ensemble français ANGEORGIEN
Géorgie : quelques exemples de chants polyphoniques
Polyphonies : ensemble géorgien RIHO
Polyphonies : l'ensemble géorgien SHAVNABADA
Polyphonies géorgiennes : l'ensemble français MZE SHINA
Géorgie : les ballets GEORGIAN LEGEND
Géorgie : les danses traditionnelles
Polyphonies géorgiennes : association française ARTILLAC
Polyphonies : l'ensemble "HARMONIE GEORGIENNE", à Paris

 



© 2013 COLISEE