Islamophobie en Azerbaïdjan
Bien que la conférence internationale tenue à Baku ait cherché à souligner le rôle actif de l’Azerbaïdjan dans la lutte contre l’islamophobie dans le monde, la situation interne du pays et les déclarations du militant religieux Alemdar Bunyatov révèlent une pression et une répression systémiques continues contre la communauté chiite.
La conférence internationale, intitulée «L’islamophobie est mise au point: exposer les biais, démolir les stigmates»tenu à Bakou en mai de cette année, a présenté l’Azerbaïdjan comme un leader mondial dans la lutte contre l’islamophobie. La participation de représentants d’organisations internationales telles que l’ONU, l’OIC, l’UNESCO et l’IF20 a aidé à encadrer le pays comme modèle de tolérance religieuse.
Cependant, en même temps, un militant chiite d’Azerbaïdjan qui a obtenu l’asile en Europe affirme que les autorités azerbaïdjanaises poursuivent des politiques islamophobes et sectaires contre leurs propres citoyens.
Selon le blogueur Alemdar Bunyatov, un représentant du mouvement de l’unité musulmane en Europe, l’état de la liberté religieuse et le traitement de la communauté chiite en Azerbaïdjan sont profondément contradictoires.
Selon les organisations des droits de l’homme, une proportion importante de prisonniers politiques en Azerbaïdjan est des militants religieux. Par exemple, en 2018, sur 150 prisonniers politiques, 100 avaient été arrêtés pour des raisons religieuses. Au cours des années suivantes, ce nombre n’a connu que – actuellement, 67 membres du mouvement de l’unité musulmane sont derrière les barreaux. Le nombre total d’individus emprisonnés pour leurs croyances approche maintenant de 300.
La plupart sont accusés de possession de drogue, de propagande religieuse illégale ou d’extrémisme. Cependant, les militants et les défenseurs des droits de l’homme considèrent ces accusations comme une motivation politique et visaient spécifiquement la communauté chiite. Les événements de Nardaran en 2015 et les incidents de la ville de Ganja en 2018 ont marqué des tournants dans la relation de l’État avec les citoyens religieux, déclenchant une vague d’arrestations de masse.
Serdar Babayev, Taleh Bagirov et des dizaines d’autres militants ont reçu de longues peines de prison uniquement pour leurs discours religieux et leurs croyances chiites. Dans la région de Talysh, en particulier à Masalli, neuf croyants chiites ont été emprisonnés pour ces raisons depuis 2012.
«Nous nous opposons à Allahshukur Pashazade et aux mollahs de la cour qui l’entourent»
Alemdar Bunyatov affirme que l’islamophobie en Azerbaïdjan n’est pas une importation occidentale mais un phénomène politique intérieur. Selon lui, alors que les communautés religieuses chrétiennes et juives reçoivent des conditions favorables, la communauté chiite fait face à la fois la non-reconnaissance des vacances religieuses et la persécution idéologique:
«Les autorités sont indifférentes à la communauté chiite, qui observe le Ramadan et le Qurban selon son propre calendrier. Nous suivons les enseignements de mujtahidés tels que Sistani et Khamenei, mais nous sommes obligés de nous soumettre aux Mufti officiels, Allahshukur Pashazade.»
Bunyatov considère ce traitement comme «une violation de la liberté de religion et une forme d’islamophobie systématique». Il affirme qu’environ 300 militants religieux en Azerbaïdjan sont actuellement emprisonnés pour ces raisons.
Ses critiques ciblent non seulement le système religieux, mais aussi les structures politiques qui y sont liées. Il soutient que le Caucase Muslim Board ne représente pas la volonté de la communauté chiite mais agit au nom du pouvoir politique:
«Nous nous opposons à Allahshukur Pashazade et aux mollahs de la cour qui l’entourent. Ils louent l’oppresseur, restent silencieux face à l’injustice et s’attendent à ce que nous fassions de même. Mais notre compréhension du chiite nous apprend à résister au mal.»
Bunyatov souligne que le mécontentement des militants de Shi’a va au-delà de la religion – c’est aussi une lutte pour la liberté politique et la gouvernance démocratique. À son avis, la réaction de la communauté chiite ne doit pas être interprétée comme un «radicalisme», mais plutôt comme une protestation contre l’injustice.
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Stigmatisation et accusations de liens iraniens
Alemdar Bunyatov critique également le fait que les militants de Shi’a en Azerbaïdjan sont souvent accusés d’être des «agents iraniens»:
«Nous ne nous sommes jamais engagés dans la propagande iranienne. C’est juste que nos chefs religieux y sont basés. Le mujtahid que nous suivons pourrait tout aussi bien être au Pakistan. C’est notre foi et il ne sert aucun pays.»
Selon lui, de telles accusations visent à la fois à discréditer la communauté chiite aux yeux du public et à la faire taire. Il s’agit d’une autre manifestation de l’islamophobie, bien que sous une forme politique et idéologique.
Nature creuse de la conférence officielle
Alemdar Bunyatov pose une question pointue:
«Si la politique du gouvernement azerbaïdjanais est elle-même islamophobe, à quel point de telles conférences internationales peuvent-elles être sincères?»
Cette question met en évidence non seulement la politique intérieure, mais aussi le contraste frappant entre l’image internationale de l’Azerbaïdjan et la réalité intérieure – entre la «propagande et les faits».
En conclusion
Les déclarations de Bunyatov rappellent un problème clé: la liberté de religion en Azerbaïdjan doit être maintenue non seulement sur le papier mais dans la pratique. Si le pays cherche à être un leader mondial dans la lutte contre l’islamophobie, il doit d’abord mettre fin à la répression à l’intérieur – en particulier pour cibler la communauté chiite – et reconnaître le pluralisme religieux.
Parce que l’islamophobie n’existe pas uniquement en Occident; Il peut également apparaître dans la politique idéologique de l’État envers ses propres citoyens. Jusqu’à ce que la diversité religieuse soit reconnue comme faisant partie du système démocratique, ces contradictions resteront non résolues.