3.5 / 5 ★
Un appariement littéraire rare qui offre aux lecteurs un aperçu de l’Abkhazie souvent négligé, créant un dialogue à travers l’histoire divisée.
Les lecteurs en anglais ont rarement la possibilité d’explorer la littérature du Caucase. Les traductions sont limitées et se concentrent souvent sur des œuvres plus traditionnelles, ce qui fait Deux romans du Caucasepublié par Academic Studies Press, un régal rare et précieux.
Le volume rassemble deux romans: Le chat du président par Guram Odisharia (traduit par David Foreman) et La rive de la nuit par Daur Nachkebia (traduit par Felix Helbing). À première vue, les romans semblent très différents – l’un satirique, l’autre poétique; L’un écrit par un Géorgie, l’autre par un Abkhazien – mais ensemble, ils offrent un portrait de Sukhumi (Sukhum), Abkhazie, avant et après la guerre. Lisez côte à côte, ils racontent une puissante histoire de mémoire, de perte, de survie et d’adaptation.
Guram Odisharia Le chat du président est une histoire douce, ironique et tranquillement absurde qui se déroule à Sukhumi, «la plus grande et la plus petite ville du monde». L’histoire commence par la découverte accidentelle d’un chat dans la résidence présidentielle. Le président – paranoïaque et excentrique – se plaigne rapidement de l’animal et l’adopte. Mais ce n’est pas un félin ordinaire: il est intelligent, charismatique et étrangement influent.
Bientôt, le chat devient un symbole de superstition et de pouvoir. Les ministres le consultent avant de prendre des décisions, les bureaucrates rivalisent pour son attention, et certains croient même que c’est un signe divin ou la réincarnation d’un héros national. Alors que le président devient de plus en plus dérangé, il s’appuie de plus en plus sur le «jugement» du chat, le traitant comme un conseiller politique de confiance. Le chat, à son tour, augmente le statut, devenant finalement non seulement une mascotte du régime, mais un acteur politique à part entière.
À travers l’ascension surréaliste du chat, Odisharia satirise la vie politique post-soviétique – ses cultes de personnalité, le leadership paranoïaque, les responsables sycophantiques et les rituels absurdes du pouvoir. Le chat est témoin des coups d’État, des révolutions, des trahisons et de la propagande. Il est loué, choyé et blâmé. En fin de compte, alors que le régime s’effondre et que le président disparaît, le chat survit – prêt, peut-être, à charger le prochain souverain.
Malgré l’humour, le roman offre une forte critique de l’autoritarisme et du bilan psychologique du pouvoir. Odisharia écrit avec chaleur et subtilité, ne permettant jamais à la satire de perdre sa touche humaine.
En contraste frappant avec les Sukhumi dynamiques et ludiques d’Odisharia, les ensembles de Daur Nachkebia La rive de la nuit dans une ville déjà détruite par la guerre. Le narrateur anonyme, un géorgien-Abkhazien déplacé, retourne dans sa maison d’enfance après le conflit. Il arrive en train, rempli d’anticipation et d’effroi, et marche dans des rues en ruine qui tenaient autrefois ses souvenirs.
La ville est presque vide. Les bâtiments sont brisés et la plupart de ses amis et de sa famille ont fui, sont morts ou ont disparu. Alors qu’il marche à travers Sukhumi, il visite des endroits familiers – son école, sa maison d’enfance, le bord de mer – et chaque endroit débloque des souvenirs vifs: moments joyeux de la jeunesse et des scènes traumatisantes de la guerre.
Il rencontre des chiffres de son passé, mais il n’est pas clair s’ils sont réels, imaginés ou fantômes. Un ami mentalement brisé, une femme qui pleure sur la plage, un homme qui est peut-être décédé il y a longtemps – tous brouillent la ligne entre la mémoire et l’hallucination.
Le narrateur réfléchit à sa première vie: la pêche et le football, son premier amour et les jours paisibles avant la guerre. Ces souvenirs sont ombragés par des plus sombres – son évasion de Sukhumi et des corps dans les rues. Dans une scène, il regarde la mer Noire et le sent pleurer avec lui.
À la fin du roman, il se rend compte que les Sukhumi dont il se souvient n’existe plus – pas physiquement et pas en lui-même. Avec l’aube qui se brise, il quitte à nouveau la ville, portant à la fois de la douleur et un sentiment de fermeture calme et incertain.
Alors que les romans d’Odisharia et de Nachkebia diffèrent par le ton et la forme, ils partagent une profonde résonance émotionnelle. Les auteurs eux-mêmes viennent des côtés opposés du conflit – Odisharia s’est enfui à Tbilissi pendant la guerre, tandis que Nachkebia est restée en Abkhazie. Pourtant, leur amitié, qui a commencé à l’Union des écrivains de l’Abkhazie avant la guerre, a subi la fracture. En 2010, Odisharia a traduit La rive de la nuit en géorgien et nachkebia traduit Le chat du président dans Abkhaz.
Ce double livre est une tentative de dialogue littéraire significatif. Odisharia et Nachkebia racontent l’histoire d’un monde perdu, de la façon dont le pouvoir détruit la réalité et de Sukhumi, qui est le «personnage» principal des deux romans. Ce double livre, bien que limité dans la portée, est néanmoins une tentative de dialogue littéraire significatif.
Détails du livre: Deux romans du Caucase Par Guram Odisharia et Daur Nachkebia, traduit par David Foreman et Felix Helbing, 2024, Academic Studies Press. Achetez-le auprès du éditeur ici.
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